Du 2 au 6 septembre, Fabien Fogal, Florent Sandoz et Gregory Damond ont relevé un défi impressionnant : le tour du Lac Léman en paddle.
28 heures d’efforts, de persévérance et de santé mentale pour ces trois amis d’enfance.
Un challenge ambitieux
L’idée de réaliser ce défi trottait dans la tête de ces amis d’enfance depuis quelques temps. Difficile mais possible, ce n'était plus une question de « si » mais de « quand » et de « comment » ! Ce projet nécessitait une préparation minutieuse : des sessions d’entraînement par étapes pour tester les capacités physiques, le matériel et les distances. Il faut dire que pagayer sur le Léman n’est pas anodin. De nombreux marins disent de ce lac qu’il est compliqué, tant les vents et les courants sont importants.
Autonomie totale
Le trio a fait le choix de tout gérer en autonomie complète, leurs paquetages sur la planche. Avec une moyenne de 6 heures de paddle par jour, ils progressaient à une vitesse comprise entre 4 et 6 km/h. L’aventure n’était pas seulement une épreuve physique mais aussi mentale, où l’organisation et la prise de décisions en temps réel étaient cruciales, comme lorsqu’ils ont opté pour passer une nuit à l’hôtel plutôt que de camper, face à des conditions météorologiques difficiles, afin de tout miser sur une dernière étape de 40km.
La complémentarité des amis :
Un facteur de réussite
Après une première tentative de 58km en 2022 jusqu’à Lausanne, puis de 108 kilomètres en 2023, les trois amis se sont élancés à l’assaut des 138 kilomètres le 2 septembre, alors que la météo semblait relativement clémente.
Un des éléments clé : la complémentarité ! Ils se connaissaient depuis l’enfance mais jamais ils n’avaient relevé un tel défi ensemble. La complicité fut donc un facteur de réussite face aux difficultés rencontrées, notamment l’avant-dernier jour, lorsqu’ils ont dû faire face à un vent soutenu et un lac agité. La progression était donc plus périlleuse et le soutien primordial.
Santé mentale
Ce genre d’aventure ne se limite pas aux compétences physiques, bien au contraire. La santé mentale joue un rôle majeur dans l’accomplissement d’un tel défi. Pour y parvenir, il est essentiel d’avoir un but bien défini, de se préparer rigoureusement et de s’entourer des bonnes personnes. Se retrouver entre amis, dans un cadre de solidarité et de soutien mutuel, renforce également le sentiment d'accomplissement. La dimension sociale et psychologique d'un tel challenge ne doit pas être sous-estimée : elle motive et donne la force de continuer, même lors des moments les plus difficiles.
Et l’expérience est là ! Fabien est gérant de plusieurs entreprises sociales de la Fondation Trajets, qui accueille des personnes touchées dans leur santé mentale (trajets.org), tandis que Gregory travaille aux Établissements publics pour l’intégration (EPI - epi.ge.ch), autre institution de la place accueillant également des personnes en situation de handicap ou en difficulté d’insertion professionnelle ou sociale. Florent lui gère 27 personnes au quotidien dans ses équipes extérieures pour la commune de Bernex (bernex.ch).
Le respect de la nature
Le défi a également mis un point d’honneur au respect de l’environnement. Contrairement à d’autres types de traversées motorisées, le paddle ne génère aucune pollution. Une manière pour Fabien, Florent et Gregory de profiter pleinement du cadre naturel, tout en réduisant leur impact environnemental au strict minimum.
INTERVIEW
Bonjour à tous les trois et félicitations pour cet incroyable exploit ! Vous avez complété le tour du Lac Léman en paddle, soit 138 kilomètres en 28 heures. Pouvez-vous nous dire d’où est venue l’idée de ce défi ?
Florent : Merci ! Je ne saurai pas dire de qui ou d'où est venu cette idée. J'ai toujours apprécié me fixer des objectifs, des buts à atteindre. Le partager avec des gens qu'on aime ça donne encore une dimension supplémentaire. Notre amitié a maintenant plus de 30 ans et très jeunes déjà on a compris qu'être ensemble pour atteindre nos objectifs nous donnait une force supplémentaire. Alors soit, nous voulions faire quelque chose qui sorte de l'ordinaire tout en restant à notre portée, soit, nous nous sommes donné une excuse solide pour passer un moment entre potes !
Comment vous êtes-vous préparés à une telle aventure ?
Fabien : Effectivement partir sur ce projet tête baissée aurait été stupide, voire dangereux. Tout d’abord nous avons dû organiser la logistique et le matériel afin d’avoir le moins de poids possible sur les planches, les étapes avec les lieux de bivouacs et les pauses de midi.
Évidement, se préparer physiquement afin de limiter l’impact des presque 300'000 coups de pagaie. Psychiquement il est compliqué de si préparer à l’avance mais d’y aller motivés et ensemble nous a permis d’envisager notre départ sereinement.
Vous avez fait le choix de tout gérer en autonomie. Pourquoi ?
Gregory : Le choix de l’autonomie est venu naturellement dans l’organisation du tour du lac. Florent et moi avons beaucoup voyagé sac à dos par le passé et nous avons fait quelques bivouacs avec Fabien.
L’idée de partir avec deux amis en paddle sans assistance et avoir de quoi dormir n’importe où, rajoute du fun à l’aventure.
Nous nous sentions libres de programmer les étapes en fonction des envies tout en tenant compte de la météo. La sensation de liberté est indescriptible lorsque vous vous retrouvez seuls sur un lac en ne distinguant pas la prochaine étape. Ou encore la sensation unique lorsque vous plongez votre pagaie dans le reflet du lever du soleil, du lac encore endormi.
La santé mentale semble avoir joué un rôle crucial dans la réussite de ce projet. Pouvez-vous nous parler de cet aspect ?
Fabien : Sur de telles distances, on ne voit pas le point d’arrivée à l’horizon et sans rien dans l’eau on ne semble même pas avancer. Une fois les douleurs physiques dépassées, c’est le mental qui prend le relais. La baie de Morges ou encore celle de Thonon sont difficile à surmonter car durant plusieurs heures, en regardant à gauche, c’est le même constat : on avance mais ... on n’avance pas... Encore une fois, surmonter ses épisodes complexes à plusieurs nous a permis de le faire. Jamais je ne l’aurais fait seul.
Il y a eu un moment particulièrement difficile lors de l’avant-dernier jour, quand le vent s’est levé et que le lac est devenu agité. Comment avez-vous réussi à surmonter cette difficulté ?
Florent : Clairement en voyant mes amis continuer à pagayer ! J'en ai même rigolé tout seul à certains moments. Peut-être de nervosité. J'ai découvert une crevaison lente sur ma planche a mi-parcours, ce qui a rajouté un léger stress en plus de la météo pas vraiment complaisante ce jour-ci ! Heureusement sans conséquences finalement. On savait que la météo serait à la limite du dangereux, mais renoncer si proche du but après autant d'efforts aurait été une grande déception pour moi, mais pour les 3 je crois. On ne sait pas particulièrement concerté pour prendre le départ ce jour-là. Mais je connais mes coéquipiers et je savais que comme moi ils avaient déjà envisagé plusieurs scénarios et que s'ils étaient sur l'eau avec moi, c'est que nous étions du même avis. Il fallait de toute manière tenter avant d'envisager un éventuel abandon.
Vous avez mentionné l’importance du respect de la nature dans votre démarche. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Fabien : Florent et moi sommes horticulteurs de formation, la nature et l’environnement sont la base de notre métier. De plus, le fait de limiter notre impact tant sur l’écologie que sur la vitesse de croisière, nous permet d’admirer notre lac avec sa faune, sa flore et ses différents paysages. Prendre le temps de l’effort mais aussi prendre le temps de partager son expérience est parfois la meilleure façon de le faire. J’ai été plutôt surpris de la propreté globale du lac avec certes, quelques zones de déchets proches des ports mais dans son ensemble, plutôt clean.
Bon…on remet ça ?
Gregory: Nous sommes en effet déjà en train de réfléchir aux prochains périples. Rester en Suisse pour faire le tour du Lac des Quatre Cantons ou celui de Constance, ou encore traverser les lacs de Brienz, Thoune et continuer pour passer par la capitale. L’idée de descendre des rivières dans d’autres pays comme la Slovénie ou le Monténégro émerge aussi.
Une fois qu’on y a goûté les projets sont sans limites !
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